
Promouvoir la diversité et renforcer la résilience dans le domaine de la cybersécurité : entretien avec Sabika Ishaq
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Dans un monde en pleine mutation numérique, la connectivité et la cybersécurité vont de pair. L’évolution de l’infrastructure numérique nécessite de mettre en place des mesures de cybersécurité rigoureuses pour préserver l’intégrité de nos systèmes et la confiance des utilisateurs. Dans ce contexte, nous avons rencontré Sabika Ishaq, Chief Information Security Officer (CISO) chez Grant Thornton Luxembourg et présidente de Women Cyber Force, afin d’explorer la relation critique entre la connectivité et la sécurité, et la façon dont la diversité favorise l’innovation et la résilience.
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Un parcours dans la cybersécurité
Sabika a commencé à s’intéresser à la cybersécurité en suivant des études en sécurité et gestion de l’information au début des années 2000, à une époque où le domaine en était encore à ses balbutiements. À la London School of Economics and Political Sciences, elle était l’une des dix femmes d’une cohorte de 150 étudiants.
Ses premiers pas dans la vie professionnelle l’ont conduite aux Nations unies, où elle a mis au point des solutions technologiques innovantes pour les régions isolées et sujettes aux catastrophes. Ces expériences ont éveillé en elle une passion pour la résolution de problèmes par le biais de la technologie, ce qui l’a finalement amenée à retourner dans le secteur privé pour se spécialiser dans la cybersécurité. « La cybersécurité est un domaine qui évolue rapidement et qui exige un apprentissage continu », souligne Sabika. « La mise à niveau et l’adaptation ne sont pas seulement des stratégies de carrière, ce sont des outils de survie essentiels. »
Le paysage luxembourgeois de la cybersécurité
Le Luxembourg se distingue par sa position de centre d’innovation numérique, soutenue par un cadre réglementaire solide et un engagement en faveur de la diversité des genres. « La posture proactive du pays en matière de cybersécurité est évidente dans ses investissements, ses initiatives réglementaires et ses réseaux de collaboration », note Sabika.
Pourtant, des défis subsistent, en particulier pour les PME, qui sont souvent confrontées à des contraintes de ressources. Des plateformes telles que la Luxembourg House of Cybersecurity et la Luxembourg House of Financial Technology (LHOFT) apportent un soutien essentiel pour combler ces lacunes.
« Bâtir une posture de sécurité ne se fait pas du jour au lendemain », explique Sabika. « Les organisations doivent surveiller et maintenir en permanence leurs systèmes de gestion de la sécurité de l’information. Cela implique des évaluations régulières des risques, une planification de la réponse aux incidents, des exercices de gestion de crise, des tests approfondis et la promotion d’une culture de sensibilisation à la cybersécurité dans l’ensemble de l’organisation. Seules une vigilance et une amélioration constantes permettent aux entreprises de se protéger efficacement dans un contexte de menaces en constante évolution ».
Women Cyber Force : donner du pouvoir grâce à l'inclusion
En tant que présidente de Women Cyber Force, la section luxembourgeoise de la Women4Cyber Foundation, Sabika dirige un réseau dynamique de 150 professionnels qui militent pour une plus grande représentation dans le domaine de la cybersécurité. « Nos initiatives sont conçues pour renforcer les capacités des femmes à chaque étape de leur carrière », explique Sabika. Il s’agit notamment de :
- Programmes de mentorat, qui offrent des conseils et un soutien aux femmes qui souhaitent s’engager ou progresser dans la cybersécurité.
- Programmes de bourses d’études, en partenariat avec le Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST), afin de parrainer des masters en sécurité de l’information pour les femmes qui aspirent à se reconvertir dans ce domaine.
Women Cyber Force organise également des événements pour faire entendre la voix des femmes dans le domaine de la cybersécurité et favoriser le dialogue entre les différents secteurs.
Réduire les disparités entre les hommes et les femmes dans le domaine de la cybersécurité
Malgré les progrès réalisés, l’écart entre les hommes et les femmes dans le domaine de la cybersécurité persiste. Au niveau mondial, les femmes ne représentent que 30% de la main-d’œuvre dans le domaine de la cybersécurité, et les postes de direction restent occupés de manière disproportionnée par des hommes. Sabika souligne l’importance des mesures structurelles, telles que les quotas, pour accélérer le changement.
« Les femmes doivent saisir les opportunités qui se présentent à elles, même si elles ne cochent pas toutes les cases », déclare-t-elle. « La confiance et la détermination sont essentielles pour surmonter les obstacles et établir de nouvelles normes ». Sabika souligne le rôle essentiel de la diversité dans la gestion efficace des crises et l’innovation technologique. « La diversité apporte des perspectives uniques, notamment en matière de communication et de collaboration, qui sont inestimables dans la gestion des crises », explique-t-elle.
S’appuyant sur son expérience à la tête d’une équipe diversifiée chez Grant Thornton, Sabika souligne la contribution de la diversité à l’élaboration de solutions équilibrées, en associant l’expertise technique à l’intelligence émotionnelle et à la vision stratégique.
L'avenir de la cybersécurité : IA, éthique et collaboration
Pour Sabika, l’intelligence artificielle (IA) va changer la donne dans le domaine de la cybersécurité. « Les considérations éthiques, la protection des données et la collaboration détermineront le succès de l’adoption de l’IA », prédit-elle. L’approche collaborative du Luxembourg à travers des groupes de travail et des partenariats est un véritable atout pour relever les défis émergents en matière de cybersécurité. Alors que la technologie progresse à un rythme sans précédent, l’engagement de Sabika en faveur de la diversité et de la collaboration dans le domaine de la cybersécurité rappelle avec force que la résilience à l’ère numérique ne se construit pas seulement grâce à la technologie, mais aussi grâce aux personnes qui la font progresser.